DIVERSIFICATIONCOMMENT LE SORGHO PEUT-IL S’INTÉGRER DANS LES SYSTÈMES DE CULTURE ?
Alors que la multiplication des aléas incite, autant que possible, à diversifier les cultures pour limiter les risques, le sorgho peut être un bon candidat à l’allongement des rotations. Explications avec Jean-Luc Verdier, ingénieur régional chez ARVALIS.
Perspectives Agricoles : Dans quelles zones le sorgho est-il cultivé en France ?
Jean-Luc Verdier : Le sorgho se retrouve dans les assolements du sud de la Loire, principalement en Occitanie et en Nouvelle-Aquitaine, dans le Centre-Val de Loire où la culture se développe, un peu en Bourgogne et en Rhône-Alpes. Cette limite nord est liée à l’exigence en températures de la culture.
Le réchauffement climatique pourrait à l’avenir modifier cette répartition. Mais c’est surtout l’évolution des précocités qui fera bouger les lignes. La gamme de variétés très précoces s’enrichit de plus en plus, en réponse aux attentes des utilisateurs qui souhaitent développer les surfaces de sorgho. Par ailleurs, localement dans le Sud, selon la disponibilité en eau, des essais sont menés pour cultiver le sorgho en dérobé, dans un objectif de produire trois cultures en deux ans.
P.A. : Quels sont les atouts agronomiques du sorgho ?J-L.V : Le sorgho exprime bien entendu tout son potentiel sur des sols profonds, mais il s’adapte tout à fait à des contextes de production moins favorables, notamment sur des sols ayant une réserve hydrique moyenne. Il présente l’avantage de ne pas être très exigeant en intrants, du fait de sa bonne capacité racinaire à extraire l’eau et les éléments nutritifs. Le sorgho est également peu affecté par les maladies et les ravageurs. L’essentiel des charges de production provient du désherbage.
Comme le maïs, le sorgho est une céréale dite en « C4 », c’est-à-dire qu’elle fixe mieux le carbone par photosynthèse que les plantes en « C3 » comme le blé. De fait, le sorgho a la capacité de maintenir sa photosynthèse en conditions stressantes (moins de pertes par respiration). Son feuillage reste vert longtemps, on parle d’effet « stay green ».
Ces caractéristiques en font une plante relativement robuste. Une étude en Midi-Pyrénées, en partenariat avec Terres Inovia, a montré qu’en conditions non irriguées, le niveau de marge brute du sorgho est comparable à celui du maïs ou du tournesol.
P.A. : Comment interagit-il avec les autres cultures ?J-L.V : A l’échelle d’une rotation, mettre en place successivement deux cultures de printemps – un sorgho suivi d’un tournesol par exemple – peut faciliter la gestion de l’enherbement, en particulier dans le cas de graminées envahissantes sur des cultures d’automne.
De plus, semé plus tard que les autres cultures de printemps, le sorgho limite le développement des graminées et leurs levées dans la culture suivante. Ce décalage répartit également mieux les temps de travaux sur l’exploitation.
Comparativement aux autres cultures, le sorgho répond bien à des restrictions en eau. Il peut se satisfaire d’un ou deux tours d’eau en situation irrigable.
Enfin, le matériel nécessaire à la conduite des cultures de printemps convient parfaitement à celle du sorgho.
P.A. : Les débouchés du sorgho sont-ils pérennes ?J-L.V : Le sorgho français est principalement destiné à l’export, en particulier vers l’Espagne et le Bénélux. Les Espagnols l’utilisent historiquement pour la fabrication d’aliments porcins ; au Bénélux, il est valorisé en oisellerie. Sa qualité, proche de celle du maïs tout en ayant davantage de protéines, et son prix d’achat – de 5 à 10 €/t de moins que le maïs – font qu’il pourrait être davantage présent sur le marché espagnol. C’est également le cas sur le marché français de l’alimentation animale qui, faute d’approvisionnement suffisant en sorgho, s’oriente parfois vers d’autres matières premières.
Par ailleurs, une association européenne, « SorghumID », s’applique à communiquer sur les qualités du sorgho auprès des acheteurs potentiels, en vue d’en développer les usages.Benoit MOUREAUX (Perspectives Agricoles)
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